« Legally, he can still abuse you »

BySCEME

« Legally, he can still abuse you »

Le projet de loi sur la protection de la femme contre la violence domestique devrait être adopté prochainement par le Parlement libanais. Perçu tout d’abord comme un progrès évident, ce projet est désormais dénoncé par la Coalition l’ayant initialement réclamé.
Credit : Sami Ayad
Quel est le problème ?

La sous-commission parlementaire chargée de l’examen du projet n’a pas hésité à le modifier en profondeur, sous prétexte que la version initiale « était en contradiction avec la Constitution et le cadre général des politiques pénales », entrainant la colère des associations de défense des droits des femmes.

Une mobilisation importante a eu lieu samedi 10 mars dernier devant le Parlement, dans l’espoir de faire pression sur les députés avant l’adoption de la loi. Nisrine Khalil, membre du collectif féministe Nasawiya témoigne ainsi : « Nous cherchons à montrer que la loi que nous voulions tant est en train de mourir. »

Un texte dénaturé par de multiples amendements

v  Un texte non spécifique aux femmes : Si à l’origine il s’agissait de protéger la femme libanaise des violences domestiques, le projet englobe désormais tous les membres de la famille (femme, homme ou enfant).

v  Le maintien de l’article 26, selon lequel « la femme peut porter les cas de violence conjugale et familiale devant les tribunaux civils, uniquement dans le cas où les tribunaux religieux le permettent ». Il revient donc aux tribunaux confessionnels de décider si l’incident est une violence domestique ou non.
v  La suppression de la clause concernant le viol conjugal : Les relations sexuelles forcées entre époux ont divisé les membres de la sous-commission parlementaire.  certains de ces derniers considérant cela comme un droit acquis à l’époux. Les députés « tenteraient » cependant de trouver une formule pour le pénaliser…Pourquoi ne pas l’avoir fait à travers ce texte ?

v  La suppression de l’article 6 qui élargissait le cercle des personnes pouvant rapporter ou signaler une violence domestique.
v  L’article 15 qui permettait le transfert de la femme victime de violence domestique et ses enfants à un endroit sûr ou dans une maison d’accueil, a également été amendé. Désormais « l’accusé s’engage à ne plus agresser la victime et les autres membres de sa famille sous peine de lui interdire l’accès de la maison pour une période n’excédant pas 48 heures ou de le mettre aux arrêts pour la même période ». Cela ne protège en rien la femme contre son mari violent. Qui se chargera d’empêcher l’accès de ce dernier a sa propre maison ?
v  L’article 17, également amendé, qui offre désormais la possibilité de déposer une demande de protection devant le juge des référés. Leila Awada, avocate et membre de l’ONG Kafa, assure que cela « ôte au délit son caractère pénal puisque le juge des référés ne statue que sur les affaires civiles ».

Si ce projet de loi est voté, il existe un risque de voir les droits des femmes libanaises régresser. Ce nouveau texte renforce ostensiblement le pouvoir des tribunaux religieux, extraordinaires, sur les tribunaux pénaux ordinaires. En effet, le code pénal libanais permet à l’heure actuelle aux femmes maltraitées de présenter une plainte pour coups et blessures au tribunal. Mais si le projet de loi voit le jour, les tribunaux religieux pourront qualifier les coups de « correctionnels » donc légitimes, empêchant ainsi tout dépôt de plainte.
Il reste peu de temps aux associations pour faire pression sur les députés afin d’éviter l’adoption d’un texte mettant en danger des droits durement acquis. Espérons qu’elles y parviennent.

 English Version
« Legally, he can still abuse you »
The new bill on the protection of women against domestic violence should be adopted really soon by the Lebanese Parliament. What at first appeared to be a major progress is now denounced by the Coalition of civil society organisations who initially drafted the bill.
What is the problem?
The Parliamentary Committee tasked with overseeing the law has deeply changed its nature, arguing that the initial version wasn’t respectful of the Constitution, which has raised the Coalition’s anger. An important mobilization took place last Saturday in front of the Parliament, in order to put pressure on the Parliament members before the bill passes. Nisrine Khalil, a member of a feminist organization called Nasawiya, said: “we’re trying to show to the people that the law we’ve always wanted is going to die”.
The proposed legislation has become completely irrelevant
The Parliamentary Committee has made so many amendments and concessions that the proposed legislation has become completely irrelevant:
v  A non-specific text: the bill’s focus on women has been watered down to include the elderly, men and children.
v  The existence of marital rape has been completely denied by the members of the Parliamentary Committee: “There’s nothing called rape between a husband and a wife. It’s called forcing someone violently to have intercourse” said Imad Hout, one of the 8 members.
v  The clause establishing a specialised police force for domestic violence cases has been deleted.
v  A new article has been introduced that grants religious bodies priority over civil law to oversee protection.
Through all these amendments the Committee tries to give more power to Lebanon’s main religious authorities, which have all vigorously opposed the bill. Religious authorities currently have jurisdiction over cases of domestic violence and want to maintain that power. If the bill is approved, says Maya al-Ammar of KAFA, it will have “succeeded in silencing the voices of women.” There is not much time left for the Coalition to put pressure on the Parliament members so that the bill won’t pass. Let’s hope for the best.

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